L’Union pour un mouvement populaire (UMP)

Parti politique français, situé à droite sur l’échiquier politique, l’Union pour un mouvement populaire (UMP) est une organisation politique qui défend une certaine idée du gaullisme. Elle a été fondée en 2002 sous le nom d’Union pour la majorité présidentielle par Jacques Chirac et est l’héritière du Rassemblement pour la République (RPR). Ses alliés traditionnels sont le Parti radical valoisien (parti de centre droit qui s’est désolidarisé de l’UMP en 2011 et qui est dirigé par Jean-Louis Borloo), le parti chrétien-démocrate de Christine Boutin et le Centre national des indépendants et paysans. L’UMP est au pouvoir depuis 2002 et détient la majorité des sièges à l’Assemblée nationale (317 sur 577). En 2011, ce parti compte environ 170 000 militants. Si l’UMP se présente comme le parti héritier du gaullisme (symbole du chêne), il a surtout été un formidable outil de rassemblement de la droite française (1), qui tend à s’émanciper de cette doctrine politique au profit d’un pragmatisme politique, libéral et pro-européen (2).

1/ L’UMP est un parti de droite qui se veut à la fois comme l’héritier du gaullisme et un outil de rassemblement de la droite. 

A/ La droite française se restructure après la seconde guerre mondiale autour de trois courants :

  • le Centre national des indépendants et paysans (CNIP) : traditionnaliste, il redonne une certaine vigueur à la droite traditionnelle sous la IVe République qui s’était trouvée très affaiblie du fait de sa collaboration avec le régime de Vichy ;
  • le Mouvement républicain populaire (MRP) : force politique nouvelle, forte de sa participation à la résistance, ce mouvement s’inspire du catholicisme social et propose une orientation politique centriste, rejetant à la fois le libéralisme classique et le socialisme. Il correspond au courant des démocrates chrétiens ;
  • le Rassemblement du peuple français (RPF) : autre force politique nouvelle, cette famille politique rassemble les partisans du général de Gaulle, qui contestent les institutions de la IVe République et estiment qu’il faut, pour reconstruire la France, un pouvoir fort, capable de mettre au pas les partis politiques. Son idéologie est le gaullisme, doctrine politique exposée notamment dans le discours de Bayeux de juin 1946.

Selon les époques, ces courants s’opposent ou s’allient. Par exemple, en 1958, le MRP et le CNIP soutiennent la politique du général de Gaulle, mais l’exercice du pouvoir et la fin de la guerre d’Algérie ramènent la division entre eux.
Le mouvement gaulliste (RPF), créé en 1947, a régulièrement changé de nom :

  • en 1958 : suite à la création de la Ve République, et après une mise en sommeil du RPF qui a duré 3 ans, il devient l’Union pour la nouvelle république (UNR) ;
  • en 1963 : l’Union démocratique du travail (UDT) ;
  • en 1967 : l’Union des démocrates pour la Ve République (UDVe) ;
  • en 1968 : l’Union des démocrates pour la République (UDR) créée par Georges Pompidou ;
  • en 1976 : le Rassemblement pour le peuple français (RPR) créé par Jacques Chirac.

B/ Sous la Ve République, la logique de la bipolarisation conduit à une disparition du centre comme force politique autonome. Il se rallie en 1974 au candidat de la droite libérale Valéry Giscard d’Estaing (VGE). Autrement dit, dans les années 70, le système de partis prend la forme d’une “quadrille bipolaire ” selon l’expression de Maurice Duverger : quatre partis d’importance équivalente coexistent, deux à gauche (PCF et PS) et deux à droite (RPR et UDF). Ces deux derniers partis se partagent l’électorat en parts égales et se disputent le leadership sur la droite.
L’Union pour la Démocratie française (UDF) est un parti créée par Valéry Giscard d’Estaing pour contrer le RPR. Il s’agit d’une fédération de partis réunissant essentiellement la droite libérale (les républicains indépendants, transformés en Parti républicain, PR, en 1977), les héritiers de la démocratie chrétienne (regroupés dans le Centre des démocrates sociaux, CDS, à partir de 1976) et les radicaux ralliés à la droite.
Cette désunion entre les deux forces de droite se constate lors du premier tour des élections présidentielles successives :

  • en 1974 : le gaulliste Jacques Chaban-Delmas s’oppose à VGE  (alors chez les républicains indépendants : le centre droite de tradition libérale), VGE remporte l’élection ;
  • en 1981 : le président sortant (VGE) affronte Jacques Chirac (RPR), l’élection se solde par la victoire de la gauche (François Mitterrand) ;
  • en 1988 : Raymond Barre (UDF) s’oppose à Jacques Chirac (RPR), François Mitterrand est réélu ;
  • en 1995 : une bataille féroce oppose cette fois deux candidats du RPR, son président (Jacques Chirac) et le Premier ministre sortant (Édouard Balladur), en fait surtout soutenu par une partie de l’UDF. Jacques Chirac en sort vainqueur, mais pour peu de temps, car il est contraint à la cohabitation dès 1997.
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C/ Dans un tel climat d’éclatement de la droite, Jacques Chirac cherche à créer un grand parti qui réunirait au nom du gaullisme, toute les tendances de la droite et du centre, ce qui lui permettrait également de se représenter pour un second mandat. Mais les résistances sont fortes. Une vague structure provisoire, l’Union en mouvement (UEM), se met en place fin 2001, qui va surtout préparer les investitures législatives de 2002.
Jacques Chirac bénéficie d’un climat favorable du fait de la faiblesse de l’UDF. L’UDF est, dès l’origine, une alliance fragile composée de notables libéraux et centristes, elle manque donc d’unité et de forces militantes. En outre, les tendances à l’éclatement se renforcent en 1998 au sujet la stratégie à tenir face au Front national (FN) divise ses composantes :

  • Démocratie libérale (nouveau nom du PR depuis 1997), derrière Alain Madelin, refuse l’ostracisme à l’égard du FN ;
  • Force démocrate (nouveau nom du CDS depuis 1995), derrière François Bayrou, veut renforcer l’UDF, en faire une force politique unifiée et non plus fédérative, positionnée au centre, autonome à l’égard du RPR et sans compromis avec l’extrême droite.

Le conflit aboutit au départ de Démocratie libérale de l’UDF.
Lors de la présidentielle de 2002, pas moins de trois candidats issus de l’UDF se présentent : François Bayrou, Alain Madelin et Christine Boutin. Leur score assez faible (respectivement, 7 %, 4 % et 1 %) consacre une large domination du courant gaulliste. Les investitures pour les élections législatives qui suivent ne sont données qu’aux candidats qui acceptent de rejoindre l’Union pour la majorité présidentielle (UMP) : les députés issus de Démocratie libérale et plus des trois quarts des élus UDF rejoignent le nouveau parti. Une minorité emmenée par François Bayrou refuse l’unification et se maintient à l’écart et donne naissance, après les élections présidentielles de 2007, au Mouvement démocrate (Modem), qui se veut au centre et indépendant.

2/ Depuis 2002, l’UMP est devenue une machine électorale au service de son leader qui s’est largement émancipée du gaullisme, mais qui conserve toutefois une partie de son héritage. 

A/ La doctrine du gaullisme défendue par le RPR peut se résumer à trois principes :

  • la volonté humaniste d’allier progrès social et liberté individuelle ;
  • une certaine idée de la France et de l’indépendance nationale ;
  • un Etat fort capable de réunir le peuple français.

L’essor du libéralisme et de l’intégration européenne conduit cependant à certains aménagements de la doctrine gaulliste, notamment sous son aspect social. Le changement de position de Jacques Chirac à cet égard est particulièrement marquant. En 1978, il rédige l’appel de Cochin où il dénonce, l’instauration du “libre-échange”, “l’inféodation de la France” et le “parti de l’étranger”, à savoir l’UDF, dont le principal représentant, VGE, occupe alors l’Elysée. Mais en 1992, lors du vote sur le Traité de Maastricht, il se fait le défenseur d’une plus grande intégration de la France à l’Europe. Les infléchissements portés à la doctrine originelle font alors apparaître le RPR comme “un parti attrape-tout” (Kirchheimer) qui modère son idéologie pour attirer les suffrages.
En outre, l’électorat du parti gaulliste a changé. Alors que le gaullisme se voulait au-dessus des partis et des clivages partisans, le RPR apparaît dans les années 70 comme un parti conservateur jouissant d’un ancrage solide chez les cadres supérieurs et les professions libérales, ainsi que chez les chômeurs, les inactifs et les agriculteurs. La désaffection concerne plus particulièrement les ouvriers (ils étaient 65 % à voter pour De Gaulle en 1965, contre 15 % environ par la suite) et les employés.

B/ La création de l’UMP marque une rupture dans le paysage politique français, car si l’union a toujours été l’horizon de la droite, la désunion a souvent été la règle. Une des raisons de son succès est que le gaullisme est une doctrine assez floue, le parti gaulliste ayant surtout pour objectif de soutenir l’action du général de Gaulle, action qui tenait lieu bien souvent de programme et suffisait à rassembler les Français. Par la suite, cette culture du chef charismatique s’est prolongée comme le montre l’absence de démocratie interne au sein du parti. À l’origine, l’UMP se présente comme le parti du président Chirac et est destiné à promouvoir son éventuel successeur. A la suite de la mise en examen d’Alain Juppé pour les emplois fictifs de la mairie de Paris, il a en fait bénéficié à Nicolas Sarkozy qui s’est fait élire à la tête du parti en 2004 avec près de 85 % des suffrages exprimés.
L’instauration en 2006 d’une élection au sein du parti du candidat à la présidentielle n’a pas mis fin à cette culture du chef. Même si le choix du candidat peut apparaître en rupture avec la mystique gaulliste qui veut que l’élection présidentielle soit la rencontre d’un homme et de son peuple (et donc à éviter toute intronisation d’un candidat à la présidentielle par des militants), la manière dont celle-ci s’est déroulée marque bien l’orientation “bonapartiste” (Rémond) qui a toujours caractérisé le gaullisme, notamment à travers le recours au plébiscite. Avant son élection à la candidature, Nicolas Sarkozy renforça considérablement les forces militantes (pour les porter à près de 300 000 adhérents) à travers une offre d’adhésion sur Internet à un prix attractif. Craignant un score extrêmement déséquilibré, les autres candidats potentiels (Michèle Alliot-Marie notamment) se retirèrent, transformant ainsi l’élection en plébiscite (Nicolas Sarkozy fut élu à 98 % des suffrages, il était l’unique candidat).
Alors que les nouveaux statuts de l’UMP prévoyaient l’institutionnalisation de tendances, ce système n’a pas été mis en place. Il était probablement trop éloigné de la tradition des partis de droite. L’UMP est donc resté un parti centralisé, dans lequel les anciennes formations ne se sont pas reconstituées en autant de tendances. Cela a facilité l’unité interne et a accru le contrôle du parti par le président de la République et ses partisans. Il demeure cependant des groupes politiques associés tels que le Centre national des indépendants et des paysans (CNIP) ou les démocrates chrétiens. Le Parti radical était aussi un parti associé. Il a quitté l’UMP en 2011 et envisage de présenter un candidat en 2012. Ce délitement, ainsi que la résistance de forces telles que celles du Modem, montre que l’union de la droite est encore loin d’être acquise, et ce, malgré la puissante machine électorale que représente aujourd’hui l’UMP.

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C/ Depuis l’élection présidentielle de 2007, pour éviter la construction d’une légitimité pour un nouvel opposant, le poste de président de l’UMP a été supprimé. Il est dirigé collégialement par un pôle législatif et un pôle exécutif sur lequel les proches du président gardent la main.
Relativement centralisé au niveau organisationnel, le parti reste idéologiquement composite. On peut y déceler trois courants principaux qui ne recoupent pas les anciennes frontières partisanes :

  • le libéralisme économique : il domine au sein du parti, comme ce fut le cas au RPR qui s’y était converti après l’arrivée de la gauche au pouvoir, alors que le gaullisme était traditionnellement plutôt interventionniste et, au moins théoriquement, souvent favorable à des politiques sociales ;
  • le gaullisme social : il est favorable aux politiques sociales, mais c’est un courant plutôt minoritaire. Il s’exprime notamment à travers certains leaders (François Fillon, Michel Barnier) ;
  • les souverainistes : ils rejettent la construction européenne par attachement à l’indépendance de la France. Autrefois dominants parmi les gaullistes (l’appel de Cauchin), ils sont aujourd’hui marginaux au sein de l’UMP. Jusqu’en 2007, ils étaient représentés par le mouvement de Nicolas Dupont-Aignan : Debout la République. Ce dernier a rompu avec l’UMP, trouvant ses positions trop peu reconnues. Il reste cependant des souverainistes à l’UMP en faible nombre.

Ainsi le mainstream idéologique de l’UMP est aujourd’hui un programme libéral avec une légère dimension sociale, et une vision internationale pro-européenne, voire atlantiste (comme le montre la réintégration de la France au commandement de l’OTAN). Il y a donc une rupture importante avec la vision gaullienne. Cependant, pour l’un des théoriciens du sarkozisme, Henri Guaino, le gaullisme serait en fait un pragmatisme : “il n’y a pas d’idéologie gaulliste, le Général a toujours adapté sa politique aux circonstances”. De la geste gaullienne, il reste à l’UMP :

  • des références symboliques comme la nation ;
  • le volontarisme d’un président qui gouverne ;
  • l’attachement à une certaine exception française ;
  • la volonté de rassembler les Français par delà le clivage partisan.